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Voyage aux îles Canaries

Hélène et Dominique Farcy

hd.farcy@free.fr



Pour renouer avec le voyage itinérant à vélo, nous avions choisi une destination qui nous offrirait les meilleurs ingrédients selon nous : du relief et du dépaysement, et de la chaleur. Pour les premiers points, nous ne fûmes pas déçus, nous n'imaginions pas par contre devoir lutter contre le froid?et même la neige !


Les îles Canaries, au nombre de sept, forment un archipel au large des côtes marocaines. Nous visiterons les trois îles situées le plus à l'ouest : La Palma, la Gomera et Tenerife, la plus étendue, et sans conteste la plus connue et fréquentée (un peu trop d'ailleurs sur la côte?).

Ces îles sont d'origine volcanique, et offrent parmi les paysages les plus spectaculaires au monde.

Le même principe de base est retenu, déjà expérimenté lors de nos précédentes escapades à vélo : voyage itinérant sans assistance (et donc transport des bagages sur le vélo), et pas de réservation au préalable de nos logements à l'étape. Ces deux ingrédients nous garantissent à la fois liberté totale du choix des étapes, et offrent la place à la surprise et à l'improvisation.

Nous n'aurons en fait aucun problème pour trouver un endroit où dormir : pensions et petits hôtels ne sont pas surchargés à cette époque. A chaque fois : accueil parfait et excellent rapport qualité-prix.


Après un voyage en avion de plus de quatre heures, nous atterrissons sur l'île de la Palma. Ouf ! nos vélos n'ont presque pas souffert du voyage. Comme chaque fois cependant, un peu de bricolage?Un rayon tordu et coincé dans les pignons, bloquant ainsi tout mouvement, (si, c'est possible !), nous vaudra quelques énervements.



La Palma


L'île de La Palma détient le record mondial d'altitude moyenne. La parcourir à vélo s'annonce très sportif. Quelques chiffres : le sommet de la Caldera de Taburiente, accessible par la route, culmine à plus de 2400m, mais ne se trouve qu'à 5 km de la côte à vol d'oiseau !

Trois jours seront consacrés à effectuer le tour de l'île, et l'ascension au point culminant.

Dès les premiers kilomètres, nous rencontrons une succession de côtes très éprouvantes : la route longeant le littoral joue en effet au yo-yo entre 0 et 1200m d'altitude ! Heureusement les paysages traversés sont à la hauteur de nos efforts : la montagne plonge littéralement dans l'océan, et est extrêmement ravinée sur la partie nord de l'île, la plus arrosée.

La culture de la banane est l'activité principale sur La Palma : même les endroits les plus escarpés sont exploités. On imagine les efforts nécessaires pour aller y cueillir les régimes de bananes.


A travers les champs de bananiers



Notre première étape sera le village de San Andrès, petit village de pêcheur aux maisons à l'architecture typiquement canarienne.


Village de San Andres


Le lendemain, départ pour la partie nord de l'île. Ici, pas de route de côte. Nous nous enfonçons dans une forêt dense à l'atmosphère humide. Cela pourrait presque faire penser à un climat tropical, si ce n'est la fraîcheur qui nous empêche de quitter les jambières. De barrancos en barrancos (ravins), la route est très sinueuse et très accidentée. Nous ne croisons que quelques voitures. A la sortie de cette forêt sub-tropicale le paysage change et nous voilà au c?ur d'une pinède méditerranéenne, enfin un peu de chaleur?


A la forêt sub-tropicale, succède en quelques km la pinède méditerranéenne?


Nous sommes maintenant sur la partie de l'île à l'abri des vents dominants : climat plus sec et par conséquent végétation moins luxuriante.

Nous nous arrêterons à Los Llanos à l'ouest de l'île. Nous dormirons dans une pension au patio couvert très agréable.


Puis des décors volcaniques?.


La troisième journée est consacrée au tour de la partie sud de l'île où se sont produites les éruptions les plus récentes en 1949 et 1971 à Fuencaliente à l'extrême sud de l'île. Deux volcans, le San Antonio et le Teneguia, alignés sur le rift sont visibles de la route, on peut même en faire le tour à pied.


La route traverse les coulées de lave


Volcan de San Antonio : la dernière éruption remonte d'hier (1971)


Nous consacrerons le reste de la journée à visiter Santa Cruz de la Palma aux nombreuses maisons à balcons traditionnels. Une réplique grandeur nature de la nef « Santa Maria » de Christophe Colomb occupe le centre d'une place, nous rappelant ainsi que les îles Canaries ont été la dernière escale, avant la traversée de l'océan pour le célèbre navigateur. 


rue typique à Santa Cruz de la Palma


La pureté et la clarté du ciel de La Palma (dont nous n'avons malheureusement pas beaucoup profité) lui ont permis d'être choisie pour l'installation d'une dizaine de télescopes internationaux situés sur le roque de Los Muchachos à 2426m d'altitude. Nous ne pouvions décemment pas quitter l'île sans faire l'ascension de son point culminant : une montée de 35 km pour 2400 m de dénivelée, plus que le Galibier, effectuée heureusement sans bagages. La montée est difficile et irrégulière (dixit Hélène), mais une fois encore les paysages sont somptueux. La route longe le nord de la caldeira et enfin le soleil et la chaleur font leur apparition. Ce sera en fait la plus chaude journée de notre séjour.

La route offre des perspectives impressionnantes d'un côté sur le littoral, et au loin l'île de Ténérife, et son sommet distant de 150kms (pic du Teide , 3718m) qui émerge des nuages, et de l'autre sur l'intérieur de la Caldeira, qui forme un cirque de 5 kms de diamètre, et de plus de 1500m de profondeur. Les nuages au fond de la caldeira en accentue l'aspect « aérien ». En quelques kilomètres, nous passons de la forêt de pins, à un univers minéral, où pratiquement toutes les palettes de couleurs sont représentées.


la route s'approche du bord de la caldeira, à travers un décors minéral aux couleurs vives


on longe la caldeira, à 2400 m d'altitude


Au dessus des nuages, vue panoramique de la Caldeira : 2400 de profondeur


La Gomera


Après trois jours et demi sur La Palma, nous rejoignons l'île de La Gomera par ferry.

La Gomera se situe à seulement 30 km au sud-ouest de Tenerife. C'est la plus petite des îles de l'archipel des Canaries après El Hierro. Elle est peu touristique, et restera celle que nous avons préférée. Nous y sommes restés deux jours. Au programme de la première journée, le Degollada (col) de la Cumbre atteint après une série de tunnels dans lesquels quelques centaines de mètres sont toujours trop longs surtout en montée, en courbe et dans le noir ! Une belle descente nous attend vers la vallée d'Hermigua. Nous gagnons la côte au vent, très déchiquetée et sauvage. Vu la température, on se croirait cependant plus en Bretagne qu'au large des côtes marocaines (pas plus de 10°, les habitants n'ont quasiment jamais vu cela début avril).


la côte très déchiquetée de l'île de la Gomera


Nous découvrons des villages splendides, et très calmes. Nous passons la nuit à Agulo, village typique aux ruelles pavées qui surplombe l'atlantique. Au loin, nous apercevons le volcan du Teide, sur l'île de Ténérife, au profil pyramidal quasi-parfait.


cultures en terrasse à la Gomera


depuis l'île de la Gomera, lever de soleil sur le volcan du Teide (3718m), sur l'île de Ténérife


village d'Agulo, sur l'île de la Gomera


Le lendemain, la route nous mène depuis la côte tourmentée jusqu'au point culminant de l'île, à plus de 1400m d'altitude, traversant ainsi le parc de Garajonay, réputé pour sa végétation et plus précisément sa forêt de lauriers géants. Brouillard et froid nous accueillent au sommet, décidément nous sommes loin des vacances « au soleil » que nous imaginions. Notre descente sur l'autre versant de l'île sera par contre au soleil : 20 degrés gagnés en seulement quelques kilomètres, et nous retrouvons une végétation rase, palmiers et cactus. La lumière est maintenant éclatante, notre dernière soirée sur cette île sera consacrée à la visite de sa capitale, San Sebastian de la Gomera, et de son port. Au loin, Ténérife, dernière des îles visitées, sur laquelle nous passerons les trois dernières étapes du voyage. Le calme et la beauté de La Gomera nous ont conquis, et on s'imagine déjà y revenir prochainement.


relief très accidenté?


traversée du parc de Garajonay


côte sud-ouest de la Gomera : aride et très lumineuse



une pension canarienne : le patio



plage de sable noir, d'origine volcanique, au fond le Teide, depuis San Sebastian de la Gomera



Ténérife


Nous avions gardé Ténérife pour la fin, nous réservant ainsi un final en beauté avec l'ascension vers le parc national du Teide, et sa gigantesque caldeira à plus de 2300 m d'altitude. Nous étions loin de nous imaginer que nous allions y subir une tempête de neige !


Après avoir débarqué au port de Los Christianos au petit matin, nous quittons au plus vite l'agitation de la côte sud de Ténérife, où se concentre le principal du tourisme de l'archipel : circulation infernale, immeubles qui poussent comme des champignons, et rarement dans le style canarien?.

Un franc soleil nous accompagne pratiquement jusqu'à l'entrée dans le parc national du Teide (35 kms d'ascension depuis la côte encore une fois !). Mais un vent déjà violent, et une température très fraîche, laissent augurer des heures difficiles.

Le Bocca del Tauce à 2100m (col) marque l'entrée dans la caldeira de Las Canadas, cratère volcanique effondré, d'altitude moyenne supérieure à 2000m, et de plus de 15kms de diamètre, ce qui en fait l'un des plus vastes au monde. La route permet de le traverser intégralement ; tracée à travers des champs de lave, elle offre des spectacles incroyables. Ce décor lunaire fut d'ailleurs utilisé pour le tournage du film « La planète des singes ».




montée vers le parc national du Teide : de 0 à 2300 m d'altitude non stop



Arrivée dans la caldera de Las Canadas del Teide : froid et vent


coulées de lave à las Canadas


Le vent maintenant très violent, et la température froide rendent la progression difficile. Nous ferons étape au parador del Teide, seul hôtel à l'intérieur du parc national, au pied du Teide. Malheureusement nous ne pourrons monter jusqu'au somment, à 3718m, du fait du vent.

A la faveur de quelques éclaircies durant la soirée, nous apprécions pleinement le site, que nous avons pour nous seuls. Ce mauvais temps a fait fuir les hordes de touristes.


pic du Teide (3718m) depuis Los Roques


décor lunaire


sous le soleil, puis le lendemain on reprend la route sous les averses de neige


Le lendemain matin, quelle surprise : nuages bas, vent encore plus violent, et surtout averses de neige !!! Nous nous dépêchons de quitter les lieux avant une dégradation encore plus importante du temps, nous faisons bien : quelques heures plus tard, la tempête de neige rendra les routes impraticables.

A l'intérieur des quelques cars croisés, les touristes regardent incrédules ces deux cyclos, harnachés comme en plein hiver, affronter la tourmente dans ces lieux plutôt inhospitaliers. Après une très, trop, longue descente nous retrouvons des températures légèrement plus clémentes à La Laguna (12° !), seule ville universitaire des Canaries. La tempête fait maintenant rage : il n'y aura plus aucune liaison maritime, ni aérienne durant 2 jours. Nous craignons de devoir retarder notre retour.



coulées de lave, au petit matin, quelques rayons de soleil sous la neige


décors magiques : désert minéral à 2300m


la tempête arrive sur le Teide : quelques heures après, plus de 100km/h de vent


Les derniers kilomètres de notre périple seront consacrés à découvrir « Las Montanas de Anaga », chaîne montagneuse à l'extrémité Nord Est de l'île. La route tracée sur la crête de ce massif offre des perspectives très impressionnantes sur l'océan.


Nord-est de Ténérife : partie la plus arrosée de l'île


la montagne se jette dans la mer, depuis le pico del Ingles


profil du voyage : les îles Canaries sont montagneuses !!!


Notre voyage aux Canaries se termine, non sans une dernière émotion. Rallier l'aéroport à vélo en pleine tempête sera un exercice périlleux. Finalement, tous les vols au départ de Ténérife Nord seront annulés. Après un transfert sur la côte sud, protégée des vents, nous décollerons finalement depuis l'autre aéroport, réservé aux vols charters.


Les îles Canaries offrent des paysages fantastiques, complètement différents de ceux qui nous avaient émerveillés lors de nos précédents voyages à vélo, en Norvège ou dans les Montagnes Rocheuses. Elles offrent une diversité incroyable, liée à leur relief extrêmement marqué (13000 m de dénivellation en 460 kms parcourus !), ce qui permet d'avoir suivant l'exposition aux vents dominants toute la palette entre végétation semi-désertique et tropicale.

Si l'on s'écarte des zones touristiques, souvent concentrées sur les côtes sud, on retrouve très rapidement tous les aspects de la vie canarienne authentique : habitat soigné, accueil chaleureux, cuisine variée (ça compte à vélo !).